C’est enfin reconnu : le taux de propriétaires influe sur le chômage

Il était temps que ça se dise, que l’INSEE le dise, l’accession à la propriété est un vecteur de chômage, pour diverses raisons (pas seulement le manque de mobilité, il y a également des causes démographiques, financières, économiques, macro-économiques). Et les causes ont tendance à être inverses en zone rurale qu’en zone urbanisée. En zone urbanisée, c’est en raison de la densité de population qui induit un coût de la vie élevé, en zone rurale c’est en raison de l’exode rural, les zones à forte densité ont ruiné les tissus économiques locaux.Les avantages urbains de la révolution industrielle ne sont plus que des chimères

L’exode rural a plusieurs causes. Tout d’abord, lorsque les machines sont arrivées dans l’agriculture, une masse de ruraux, ouvriers des fermes ou membres des familles de paysans, se sont retrouvés désœuvrés. Ils sont donc partis à la ville chercher du travail, augmentant la densité urbaine. A l’époque, les infrastructures n’étaient disponibles qu’en zone urbanisée. C’est là qu’il y avait les infrastructures ferroviaires, portuaires, les routes. Et ça a perduré jusque très tard puisque jusque dans les années 70 le téléphone n’était pas partout. Où je vis, l’électricité est arrivée en 64,  le téléphone en 78, l’eau en 84, la route n’a été élargie et goudronnée que dans les années 60, en plusieurs étapes. Or l’industrie lourde de l’époque avait besoin de ces infrastructures. Elles se sont naturellement installées dans des zones qui soit étaient urbanisées, soit qui se sont urbanisées du fait de l’installation des usines, parfois si importantes que tout un territoire pouvait travailler dans la même.

Aujourd’hui les routes sont partout. Le téléphone, l’électricité, l’eau courante, sont partout. L’éducation également est partout, les taux de réussite au BAC sont d’ailleurs volontiers plus élevés en zone rurale qu’en zone urbanisée, le décalage civilisationnel faisant que les jeunes ruraux sont moins dissipés que les citadins, même si ce point aussi a tendance à se restreindre. Ce n’est pas un jugement de valeur, le progrès vient des villes, plus que des campagnes, même si l’avenir se trouve dans les campagnes pour bien des cas et le nombre croissant de « néo-ruraux » est là pour le prouver.

Propriétaire, oui, mais à quel prix ?

L’acharnement à être propriétaire d’un bien, surtout à un prix surfait comme c’est le cas depuis des années, est une absurdité économique. Certainement pas un complément de retraite pour beaucoup qui sur une durée de crédit de 20 ou 30 ans trouveront bien des écueils qui les feront déchanter. Pour dire des horreurs, ce sera déjà bien si à la retraite les acquéreurs auront fini de payer la part de dette restante après la liquidation aux enchères du bien quand ils auront fait faillite avec l’éclatement de la bulle. Bien sûr, c’est un cliché qui ne représente heureusement pas la majorité, je grossis le trait. Il n’en reste pas moins qu’on ne devient propriétaire que si on en a les moyens et seulement dans ce cas-là et encore faut-il les conserver sur des décennies.

Le PTZ est une arnaque visant à pomper l’argent public vers la poche des riches, une fois de plus. Ca favorise l’acquisition et donc ça permet aux promoteurs de vendre, cher, BEAUCOUP trop cher. De même que les APL, qui sont également un moyen pour les promoteurs de vendre trop cher, puisque que grâce à elles, le propriétaire pourra louer trop cher à un locataire qui n’aurait pas les moyens d’assumer le loyer…Et tout ça sur fond de ralentissement de la hausse du pouvoir d’achat. Le salaire médian est un bon 20% en-dessous de ce qu’il devrait être. La qualité de l’emploi se dégrade…et pourtant il n’y a jamais eu autant de primo-accédants alors que les prix sont surfaits de 20% à 40% selon les endroits. Ca ne peut évidemment pas marcher à long terme !

Propriétaire, une contrainte pour le possédant comme la société

Si les propriétaires sont plus stables, c’est parce qu’ils sont bien plus soumis à leur condition induite par leur situation de débiteur que les locataires. Un locataire qui ne peut plus payer son loyer déménage, un propriétaire fait faillite s’il ne peut pas vendre ou s’il loue et que son locataire ne paie pas. S’il va au chômage et qu’il ne parvient pas à résoudre sa situation, l’assurance ne va pas payer à sa place ad aeternam. En fin de droit, il perd le bien et se retrouve avec la dette. Alors il devra accepter moins bien et là le crédit va devenir lourd à payer, mais il n’aura pas le choix.

J’en ai connu pas mal des propriétaires dans ma vie, qui sont bien installés. Typiquement, Monsieur a une bonne place, une belle voiture, qui lui sert à lui et à la famille le week-end et les vacances au Camping trois étoiles de la Clape au Cap d’Agde. Madame a un travail à temps partiel, qui lui permet de s’occuper des enfants, elle a une chouette petite voiture pour aller faire les courses, amener les enfants à l’école.

La situation de Monsieur évolue, il vend sa belle voiture pour s’acheter une poubelle. Ca ne suffit pas, Madame doit se chercher un travail à plein temps. On renonce à la nounou, on va vers du plus collectif. Finalement on vend la voiture de Madame, elle utilisera celle de Monsieur qui prendra son vélo pour laisser la poubelle à Madame ou alors c’est lui qui fera les courses. Le locataire n’a pas cette contrainte du risque de faillite sur son patrimoine. Il peut bien évidemment se surendetter. Le propriétaire aussi, mais dans ce cas c’est en plus de son crédit immobilier, d’autant que le propriétaire a plus de facilité à emprunter.

Et il y a aussi les incidences économiques locales. Une zone à forte densité de propriétaires, c’est une zone de forts impôts locaux. L’eau est chère, l’impôt foncier est cher, il y a des taxes spécifiques ordures et autres. Le niveau des salaires est élevé, la compétitivité des entreprises est donc tendue et au moindre retournement de marché, changement de conjoncture, obligatoirement, la rentabilité s’effondre, la trésorerie manque rapidement.

Il y a enfin les incidences macro-économiques, les conséquences des dépenses de l’Etat pour créer ces « points de richesse », avec de belles entreprises, un fort taux de propriétaires, tout ça génère de la croissance, mais aussi du déficit primaire. Rappelons au demeurant que des pays comme les Pays-Bas, la Suisse ou l’Allemagne sont des pays de locataires. Les riches eux-mêmes sont volontiers locataires. D’être propriétaire par principe relève plus du caprice qu’autre chose.  La propriété est un truc de pauvres. Plus un pays est riche et moins son taux de propriétaires est élevé. Le taux de propriétaires sclérose l’économie qui devient moins agile, moins innovante, moins réactive. De fait, plus un pays a un taux de propriétaires élevés et plus son salaire moyen est bas parce que plus sa population est économiquement inefficiente.

La révolution numérique du 21ème siècle est la réponse

La solution est simple : il faut installer ces entreprises en campagne, là où les biens immobiliers sont bon marché. Propriétaire comme entreprise auront alors de petits loyers. Et avec la révolution numérique, la surcharge éventuelle de coûts induits par la distance sera largement compensé par les économies sur les loyers et la structure qui sera le plus dématérialisée possible pour exploiter l’opportunité que représentent les IT aujourd’hui. L’industrie lourde de la révolution industrielle a été délocalisée, l’essentiel des entreprises produit des services et les liaisons pour de la logistique ne sont plus un problème. Et cette décentralisation permettra même éventuellement d’étendre son marché en se trouvant dans une situation plus centrale.

Des zones de fort taux de propriétaires en haute densité de population, c’est une fois de plus un concept du 20ème siècle avec les problèmes du 20ème siècle et l’exode citadin offre certaines des réponses. Bien sûr, l’entreprise qui s’installe en campagne devra importer ses salariés, qu’elle ne trouvera pas sur place. Pour ce faire, elle devra trouver à collaborer avec des partenaires, pour référencer les biens à louer/acheter et garantir ainsi un logement. Il lui faudra des partenariats avec des agents immobiliers, des banques locales. Et les salaires ne seront pas plus élevés qu’en zone urbanisée, mais le coût de la vie local étant notablement plus bas, un salaire qui n’atteint pas le niveau qu’il aurait dû si la courbe de la progression du pouvoir d’achat avait poursuivi sa lancée normalement ne compromet pas la qualité de l’emploi. Ce qui offre un meilleur niveau de vie au salarié en sus d’une meilleure qualité de vie tout en permettant à l’entreprise de contribuer dans de bonnes conditions à la croissance.

Plus de compétitivité, une meilleure qualité de vie pour tous, une influence beaucoup plus sensible sur la dynamique économique locale, une contribution au développement d’internet en zone rurale. Elle trouvera un soutien plus fort des autorités locales, qui se battent pour leur installation, avec des subventions locales (raccordement offert, impôts locaux offerts sur X années, etc…) et les investissements seront moindres puisque l’immobilier lui reviendra moins cher. Les avantages sont innombrables.

Vive le 21ème siècle pour résoudre les problèmatiques du 20ème siècle.

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